Webinaire de Jean-Marie Mouchel : "Se baigner à Paris ?"

par Jean-Marie Mouchel, professeur à Sorbonne-Université et directeur de l’UMR Metis.

L'organisation des Jeux Olympiques et Paralympiques à Paris a mis en lumière un enjeu majeur et oublié depuis des décennies. Dans la deuxième partie du XIXième siècle, l'objectif de l'assainissement a été d'évacuer les eaux loin du centre de la ville, vers des champs d'épandage et/ou vers la Seine. L'expansion urbaine et la demande foncière ont rapidement eu raison de la stratégie basée sur l'épandage qui visait au recyclage des matières, et qui est devenue dépassée vers 1910. Depuis ce fut un flot toujours croissant d'eaux usées déversées sans traitement en Seine (et en Marne) jusque dans les années 1970, époque où les berges de la Seine étaient aussi transformées en autoroute. Le chemin a été long ensuite à partir de la loi sur l'eau de 1964 pour revoir l'efficience des réseaux, la capacité de traitement des usines d'épuration tout en accompagnant un accroissement urbain considérable. Au cours des cinquante dernières années se sont combinés ou succédé plusieurs objectifs, allant de la lutte contre les rejets industriels à la collecte et au traitement des eaux municipales. Des séquences d'objectifs de plus en plus exigeants ont permis de réduire les rejets de matières organiques, d'azote et de phosphore, pour protéger le milieu aquatique et faciliter différents usages liés à différents types de prélèvements (eau ou biote).

Dans le cas de la baignade il s'agit de protéger directement l'être humain en contact direct avec l'eau. La réduction de la contamination nécessaire est beaucoup plus importante que pour les enjeux précédents. Pour s'en convaincre, notons que le rapport de concentrations entre une eau réputée de bon état en rivière et une eau usée municipale est de 3% pour la DBO5 (les matières organiques) ou l'azote, mais seulement de 0,01% pour E. coli (indicateur bactérien de contamination fécale). Deux conditions doivent donc être réunies pour épurer 300 fois mieux : d'une part renforcer les filières d'épuration par des traitements de désinfection spécifiques, et d'autre part lutter contre tous les déversements d'eau non traitée (rejets pluviaux et rejets directs) car il faut en effet une étanchéité quasi-parfaite du réseau pour atteindre l'objectif, ce qui redistribue les efforts nécessaires.

Cet exposé présentera une analyse des flux de E. coli dans la Seine et la Marne. Cette analyse a été rendue possible par la quantité considérable de données qui ont été acquises à l'occasion du plan d'amélioration de la qualité de la Seine et la Marne en préparation des JO de 2024 et de l'ouverture de futures baignades en rivière. Elle est largement basée sur la modélisation des apports, du transport et de la dégradation en rivière des E. coli, principale bactérie indicatrice fécale.

Date
16/04/2024 13:00 - 16/04/2024 14:00
Localisation
Visioconférence